Maripaule témoigne de la myosite nécrosante auto-immune (anti-SRP) diagnostiquée en 2019

Merci à Maripaule pour cet édifiant témoignage. Elle nous raconte comment la myosite, qui était là à bas bruit a explosé suite à un épisode infectieux. Beaucoup de résilience !  Maripaule vient tout juste d’intégrer l’équipe du GIMI. 

 

Janvier 2019

J’ai une mononucléose : fièvres élevées, douleurs musculaires, grosse fatigue : 2 de tension ! Je me traine péniblement d’une pièce à l’autre et passe mes journées couchée. On surveille le foie qui est malmené par la mononucléose.

2/3 mois passent, toujours excessivement fatiguée, et peu à peu je constate que j’ai du mal à croiser les jambes, à lever le pied pour me déshabiller, à me relever de la position assise, j’ai du mal à avaler… J’en parle à ma généraliste qui met ça sur le compte de la fatigue, j’insiste : c’est une faiblesse musculaire bien différente de la fatigue. Mes constantes du foie sont très mauvaises, j’ai rendez-vous très vite chez un hépatologue qui, au vu des symptômes cliniques, suspecte d’emblée une maladie musculaire. Il me prescrit une batterie de recherche d’anticorps, qui révèle la présence d’anti corps Anti SRP.

En quelques semaines je peine à marcher, chute, éprouve de grandes difficultés pour franchir des marches, en position couchée je suis obligée de rouler et de mettre à 4 pattes et les problèmes de déglutition s’aggravent ce qui accélèrent une hospitalisation à la Timone pour diagnostic ; 30 avril soit 4 mois après le début de la mononucléose.

Entretemps bien sûr j’ai cherché sur internet les interprétations des analyses, tout concorde pour une myosite auto immune nécrosante.

La recherche d’anticorps par le centre de référence et 2 autres labos ne donne plus rien, la biopsie confirme le diagnostic. Je ressors avec une prescription médicale, corticoïdes et Imurel ; c’est l’interne qui me la donne (interne attentif et consciencieux !) avec des séances de kiné quotidiennes et une recommandation : limiter le sel !

Je suis assez choquée : je pensais avoir un descriptif des exercices à faire, voir une diététicienne… rien !

J’ai 61 ans et une certaine expérience… Je réalise que ma maladie évoluait sans doute à bas bruit depuis quelques années car j’avais constaté une grande baisse de mes capacités, aggravées lors de repos prolongé. J’avais donc, depuis qq années, mis en place des petites séances de musculation 5 jours sur 7 chez moi. Cela a sans doute joué sur l’évolution de ma maladie, en compensant un peu la dégradation musculaire ; d’autre part ayant toujours été très sportive, j’avais un bon capital musculaire.

En plus des séances de Kiné, je fais donc ma gym quotidienne. Certains gestes me sont impossibles : par exple assise relever la jambe. Je lève donc ma jambe avec la main, je lâche, elle retombet. Le lendemain pareil jusqu’à ce que j’arrive à tenir une fraction de seconde, puis un peu plus, jour après jour des progrès au millimètre, aussitôt perdu en cas de jour de repos. Pendant 4 mois j’ai tenu ce rythme quotidien, ensuite j’ai pu m’octroyer 1 jour de repos tous les 3 jours. (franchement c’est gonflant, je déteste la muscu !)

J’ai fait pendant de longues années du judo en compétition, mais jamais je n’ai autant « souffert » moralement et physiquement ! ça m’a sans doute aidé à me faire violence pour cet entrainement. Je me suis inspirée d’un témoignage d’un prof d’EPS sur le site de l’AFM.

J’arrive à évaluer mon besoin quotidien en protéines (via les sites de sport), mes besoins en Calcium, la limitation en sodium ; avec ça je fais un tableau avec ces valeurs pour chaque repas et bilan journalier. Inutile de dire que les courses deviennent très compliquées car j’analyse la composition de tout !

Les sardines c’est 20 gr de protéines mais 1 gr de sel ; reste à trouver 65 gr de protéines tout en ne dépassant pas le sel, etc. Je complète avec des préparations de protéines végétales. J’ai aussi supprimé gluten et lactose (le gluten depuis 10ans déjà à cause de l’arthrose et ça a bien marché).

Au bout de quelques mois je suis rodée, je ne fais plus de tableau de menu ; je n’ai peut-être pas toujours mon quota de protéines car je suis moins attentive.

2 ans après je récupère toujours un peu, il a fallu changer l’immunosuppresseur, la maladie semble régresser mais je suis dépendante à la cortisone.

J’aimerai revenir sur le choc psychologique…

La maladie est apparue après une succession de galères au moment où j’espérais « profiter de la vie », comme on dit. Sentiment d’injustice, rage, peur panique de mourir étouffée et d’une fin de vie en perte d’autonomie.

J’ai tout de suite fait des recherches pour l’euthanasie, décider de faire un dossier en temps utile, et indiquer mes directives de fin de vie. Ça a choqué mes collègues à qui j’en ai parlé mais moi ça m’a rassurée et j’ai arrêté d’angoisser à ce sujet ; je verrais bien au fur et à mesure.

J’ai une surdité qui a été diagnostiquée à 20 ans -avec d’ailleurs un diagnostic erroné sur la pathologie que j’ai trainé 20 ans- on m’a alors annoncé que je deviendrai sourde complétement, sans expliquer ce que signifiait cette perte auditive en termes de conséquences. Alors 10 ans de déni, puis 10 ans encore pour gérer la perte auditive avec la mise en place de compensation avec un appareillage à peu près efficace et l’apprentissage de la lecture labiale. Mais la surdité envahit tout, je vis dans une bulle. C’est en réalisant que je peux avoir un cancer, un accident, etc. que je comprends que la surdité n’est pas toute ma vie et que je commence à en me prendre en main. Vers 50 ans, nouvelle aggravation, coup dur, c’est encore un choc mais cette fois je remonte la pente plus vite et surtout je peux me faire implanter. Le résultat est que je vis mieux à 60 ans avec cette surdité profonde quasi-totale, qu’à 20 ans avec une surdité sévère.

Conclusion ? la peur du handicap est pire souvent que le handicap lui-même.

Depuis plus de 20 ans je suis en association, cela m’a beaucoup apporté et j’espère avoir apporté quelque chose à d’autres personnes et avoir contribué au travail associatif. C’est pourquoi tout de suite je me suis tourné vers l’AFM téléthon, avoir les bonnes informations, le soutien et peut être être acteur de sa maladie plutôt que la subir.

En quelques mois la maladie a explosé, j’ai eu un diagnostic, je me suis effondrée, traitement mis en place, rééducation, progrès, choc assimilé. Même si la maladie est inacceptable, je ne me résigne pas, je compose avec- bien obligée- je m’adapte, je sais très bien qu’il y a une possibilité d’aggravation, d’invalidité mais je ne me focalise pas là-dessus. Il faut envisager le pire en effet, mais vivre en construisant autant que possible. J’estime avoir eu beaucoup de chance avec un diagnostic rapide et une bonne récupération ; j’apprécie la valeur de ma santé.

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